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Du mythe biblique à la réalité politique : Histoire du sionisme chrétien

Le sionisme est souvent présenté comme une idéologie juive née au XIXe siècle. Pourtant, bien avant que les premiers leaders juifs ne militent pour un État hébreu, des chrétiens, notamment protestants évangéliques, rêvaient déjà du retour des Juifs en Terre sainte. Ce « sionisme chrétien », souvent méconnu, a largement influencé les choix politiques des grandes puissances — notamment britanniques et américaines — au tournant du XXe siècle.

Une idée biblique… reprise par les chrétiens

L’idée du « retour à Sion » vient bien entendu des textes bibliques. Mais au XIXe siècle, ce ne sont pas des rabbins ni des militants juifs qui la popularisent dans les sphères du pouvoir occidental, mais des pasteurs protestants et des intellectuels chrétiens. Leur lecture littérale de la Bible les pousse à croire que le retour des Juifs en Palestine est une condition au retour du Christ.

Des figures comme Lord Shaftesbury (1801–1885), un aristocrate anglais évangélique, militent déjà en 1839 pour une « restauration d’Israël » en Terre sainte — non par amour du judaïsme, mais par eschatologie : le destin d’Israël est vu comme un jalon du plan divin.

1917 : La Déclaration Balfour, un tournant politique

Ce courant religieux finit par imprégner la politique étrangère britannique. En 1917, le ministre des Affaires étrangères Arthur Balfour adresse une lettre au baron Rothschild déclarant que le gouvernement britannique « voit d’un œil favorable l’établissement en Palestine d’un foyer national pour le peuple juif. »

Cette Déclaration Balfour, en pleine Première Guerre mondiale, n’est pas qu’un geste géopolitique : Balfour et plusieurs membres du gouvernement britannique étaient eux-mêmes influencés par le sionisme chrétien. L’idée d’un « retour prophétique » des Juifs servait à la fois des intérêts bibliques, impériaux… et stratégiques.

1948 : Quand la prophétie devient réalité (selon eux)

Avec la création de l’État d’Israël en 1948, ce courant s’enflamme. Pour les sionistes chrétiens — surtout aux États-Unis, dans les milieux évangéliques — c’est la confirmation d’une prophétie millénaire. Beaucoup y voient la preuve que Dieu agit encore dans l’histoire, et que le retour de Jésus est proche.

C’est à partir de là que le sionisme chrétien devient un pilier du soutien américain à Israël. Des présidents comme Ronald Reagan, George W. Bush ou Mike Pence y ont tous fait référence, plus ou moins explicitement.

Une alliance paradoxale

Le sionisme chrétien est souvent plus fervent que le sionisme juif lui-même. Mais il repose sur un paradoxe : pour ces chrétiens évangéliques, les Juifs doivent retourner en Israël pour… finir par se convertir ou être jugés à la fin des temps. Le soutien à Israël est donc instrumental, et non purement bienveillant.

Conclusion

Loin d’être un phénomène strictement juif, le sionisme a d’abord été soutenu et préparé par des chrétiens convaincus de l’accomplissement des prophéties bibliques. Aujourd’hui encore, des millions d’évangéliques américains soutiennent Israël non par solidarité politique, mais par foi millénariste. Comprendre cette dynamique permet de mieux saisir la complexité du soutien occidental à Israël… et les zones grises qui l’entourent.

Christianisme, Croyances et Religions, Judaïsme
Colonisation, Religions, Sionisme chrétien